Skip to content

5.2 Urbanisme et anthropologie

Les villes concentrent désormais l'essentiel de la population de la planète et ces évolutions remettent en cause les anciens modèles de sociabilité. La dialectique qui oppose espace public et espace privé est un élément majeur pour comprendre la dynamique d’une société. L’anthropologue Abraham Moles estimait à ce propos que tout espace social possède un double caractère, à la fois sociofuge et sociopète. Cette double dimension permettrait selon lui de favoriser le contact entre les individus tout en maintenant les distances entre les groupes sociaux. Les rues, places et commerces sont des institutions centrales de l’espace urbain. Elles illustrent plus particulièrement la fonction sociale de l’urbanité en permettant aux acteurs de s'insérer dans des réseaux plus vastes. Ces articles en préparation s'efforcent d'en comprendre les modalités.
 
L’espace de la rue. La dialectique qui oppose espace public et espace privé est particulièrement importante dans les villes, lieux de brassages par excellence au travers de leurs rues, de leurs places et de leurs modes de déplacement. Les études de la foule comme phénomène sociologique abordent rarement la spécificité des interactions qui se déroulent dans le cadre urbain. L’espace urbain est tout d’abord dépourvu, de ce point de vue, des obligations de civilité de la vie villageoise. Une même forme d’anonymat concerne les maisons et les immeubles qui la bordent. La gestion de cet espace est devenue de nos jours l’enjeu permanent de tensions entre les acteurs publics et privés.
 
Jardins prives et espaces verts. Les espaces verts urbains constituent l’un des lieux modernes de médiation entre les deux pôles de la vie sociale que représentent les espaces publics et privés. Les espaces verts sont en effet une invention récente en matière d’urbanisme, à la différence des jardins privés beaucoup plus anciens. Ces derniers ont connu un développement sans précédent avec l’essor de l’urbanisme pavillonnaire. Ils possèdent de nouvelles dimensions, une dimension ostentatoire héritée de leur caractère originellement nobiliaire, une dimension hygiéniste qui remonte au 19ème siècle et une dimension traditionnelle et populaire issue de la ruralité. Les études des interactions entre espaces verts et jardins privés sont relativement rares. Les standards des espaces verts urbains sont par contre mieux connus.
 
Les cimetières. Le cimetière est un lieu central de transition entre l’espace privé et l’espace public, en tant qu'espace de sociabilité à la fois ouvert à tous tout en abritant l’intimité des familles et des communautés. Les cimetières apparaissent au début du 19ème siècle en Europe sous leur forme moderne, qui répondait aux impératifs hygiénistes de l’époque. Ils fournissent des informations intéressantes sur la généalogie et la structure sociale d’une société. Outre leur importance sociale, les cimetières possèdent par ailleurs une valeur historique et artistique. Généralement aménagés et parfois même paysagés, ils renferment notamment des œuvres d’art monumentales comme des formes originales d’art de tradition populaire. Le rôle des entreprises funéraires est fondamental en matière de standardisation des modèles, voire aussi par leur impact sur le déroulement des rituels civils ou religieux. Il en va de même de l’intervention des pouvoirs publics en matière d’aménagement. La scénographie d’un cimetière va dès lors se composer d’éléments codifiés, offrant et préservant dans le même temps une forme limitée d’intimité. Le monument funéraire s’apparente désormais à un dispositif de médiation entre espace privé et espace public d’un grand intérêt.
Published inUrbanisme